Archives mensuelles pour mai 1994

La source – présentation

LA SOURCE, écriture, mise en scène, scénographie, musique Arlette Bonnard, Alain Enjary, Christian Maire et une classe d’enfants, en collaboration avec Pierrette Maire, enseignante. Créé le 27 Juin 1994. Collège Romain Rolland, Sainte-Geneviève-des-Bois. Production Éducation Nationale et AMBRE. Avec 26 enfants de Cours Moyen 2e année.

Pendant une année scolaire entière, tout en respectant « le programme » officiel de la classe de CM2 dans toutes les matières, l’enseignante l’a organisé à partir d’un seul thème : l’eau, qui ainsi, si on peut dire, a drainé les multiples apprentissages (scientifique, mathématique, littéraire, etc.) sur un axe très concret, à la fois unique et ouvert. Elle ne pouvait envisager ce projet pédagogique qu’avec une intervention extérieure très active et concernée. Celle-ci s’est faite à trois : auteur (et comédien), metteur en scène (et comédienne), musicien (et compositeur), ce dernier apportant des instruments originaux construits sous sa direction par des élèves d’un collège d’enseignement technique.

Parallèlement aux cours, sur ce même thème, semaine après semaine, en présence de l’enseignante, nous avons travaillé avec les élèves l’écriture, la mise en scène, le jeu, la musique d’une pièce qu’ils auraient la responsabilité et le plaisir de représenter plusieurs fois en public à la fin du troisième trimestre. Exercices, improvisations, jeux, débats, réécritures, répétitions, exigences et rigueur d’un résultat que nous avions tous à atteindre. Bien au delà d’une « animation », et même d’une simple notion d’« atelier », il s’est agi, en assumant les contraintes particulières à l’expérience, d’une véritable recherche et d’un acte artistique, et bien plus qu’une récréation, d’une vraie création, ou chacun des 26 élèves avait un rôle à la fois individuel et choral.

Le sujet de la pièce : quelques personnages — minéraux, végétaux, animaux, humains, dans une attente inquiète, autour d’une source tarie. Puis l’arrivée de l’eau dans tous ses états, sous toutes ses formes, par toutes ses voies, de toutes ses provenances, aériennes, souterraines, chaudes, froides, proches ou lointaines, lumineuses ou obscures. L’eau unique et diverse par ses origines, ses parcours, ses manifestations, ses métamorphoses, ses « expériences intimes » — matière à interprétation anthropomorphique et personnelle par différents enfants, venant se rassembler, pour finalement constituer un chœur, avec les personnages, divers aussi, qui l’attendaient. L’ensemble étant accompagné d’éléments musicaux également assurés par les élèves.

À la réussite concrétisée de cette aventure, qu’on peut qualifier d’humaine et poétique, et dont le témoignage dans ce sens du public présent aux représentations a confirmé, si besoin était, celui de l’enseignante et le nôtre, il faut ajouter que tous les enfants de la classe sont passés en sixième sans problèmes ; quelques-uns d’entre eux, « à la traîne » sur le plan scolaire, l’un en particulier depuis plusieurs années, reprenant sans doute une certaine confiance en soi et un nouvel intérêt à la connaissance par cette sorte de mise en pratique — littéralement : cette expérience — et ce léger déplacement de valorisation personnelle au sein du collectif, se sont trouvés très visiblement transformés et « réintégrés ». Nous avions déjà pu constater des phénomènes semblables à l’occasion d’autres interventions de ce genre, même plus sommaires. Ils ne vont pas forcément de soi ; ils sont liés au travail théâtral et au travail pédagogique proprement dits, ainsi qu’à l’attitude particulière des praticiens, qu’il est plus difficile de formuler. En tout cas, en l’occurrence, et aux dires des parents, les enfants ont rarement été chaque jour à l’école avec autant de facilité, et même d’impatience, que durant toute cette année scolaire.

La source – photos