Le recueil des petites heures – extraits de presse

Le mythe et le quotidien : Le Recueil des petites heures
Il arrive qu’un écrivain trouve le moyen de rester auprès de nous, tout près, à nous toucher,  — et nous emmener à des distances capables de nous donner un certain vertige. Un secret d’abord : ne pas satisfaire notre curiosité. Dans ces petites heures, nous ne saurons jamais du Commerçant et du Visiteur où va les conduire leur voyage ni quel est le pays où l’on a mis dans deux cellules jumelles Elle et Lui qui s’ignorent et se rejoindront à la fin, ni dans le plus beau peut-être de ces textes, Entre trois et quatre, qui est cette Autre séparant à jamais un couple naissant. Nous ne savons pas, nous aimerions peut-être savoir et peut-être pas, comme dans un autre texte du même auteur Sept, où le mystère au fil des paroles à la fois s’épaissit et s’allège. Et le spectateur joue avec ces Inconnus, — avec ces inconnues.
Pourquoi ? C’est qu’il comprend tout à coup ce qu’on est en train de lui dire. Et c’est le second secret de cette écriture : apporter ce sans quoi le théâtre n’est qu’une aimable distraction, la dimension du mythe. Un théâtre du mythe : Sept était le mythe du voyage de la mort, du passage fatal. Chacune des fables du Recueil est un petit mythe ; et ce qui se passe à chaque fois, c’est la transformation ironique d’une histoire sinon banale, en tout cas appartenant à un genre connu — en un obscur mythe de la destinée. (…)
Et ce qu’apporte l’écriture, c’est dans ces textes un moment, celui où la parole du quotidien devient tout à coup, sans paraître changer, la parole poétique : c’est ainsi que nous recevons, excités par l’incorrection même de la parole « étrangère », l’étonnant récit de l’amour manqué dans Entre trois et quatre — parole devenue celle-même de la mémoire — ou dans Les Fenêtres, l’ironie de l’Homme moquant les prisonniers qui n’osent sortir de leur prison. Le travail du poétique ici, tout à fait théâtral, c’est le mouvement même de la phrase, l’élan du langage, qui transfigure le discours. Le poétique alors, s’élevant du quotidien, rejoint sans effort le mythe. Anne Ubersfeld, L’AVANT-SCÈNE.

Si l’art est ce qui permet de dire l’indicible, alors le théâtre selon Alain Enjary et Arlette Bonnard est du très grand art. (…) Ensemble, d’un spectacle à l’autre, ils vont osciller entre l’infiniment grand (Ulysse ou Pantagruel, d’après Rabelais) et l’infiniment petit (La Sente étroite du bout du monde, montage de haïkaï, ces minuscules poèmes japonais). « Le haïku, comme une petite graine qui contient déjà tout. »
Définition qui pourrait s’appliquer à toutes les pièces d’Alain Enjary. En particulier à sa trilogie : Lila, Le Château dans les entrepôts et Nord-Est, et à ce Recueil des petites heures, qui réunit cinq pièces, courtes, drôles, intrigantes. Comme la mythologie hindoue, elles peuvent se lire à plusieurs niveaux : polar, aventures, science-fiction… ou quête métaphysique. Le moteur de son œuvre, c’est la nostalgie de l’enfance, d’une transparence à retrouver après être passé par la conscience et la culture. (…)
On marche beaucoup dans le théâtre d’Alain Enjary. Et quand le voyage n’est pas le corps même de la pièce, il en est toujours l’aboutissement. Chacune des cinq pièces de ce Recueil des petites heures s’achève sur un départ qui ressemble à une évasion.
Fugace, évanescente, légère, ténue, fragile, mince, impalpable, mais pourtant exacte, précise, méticuleuse… Les mêmes adjectifs reviennent sans cesse pour qualifier l’œuvre d’Alain Enjary. On est très proche du  » je ne sais quoi  » et du  » presque rien  » de Jankélévitch. Ils sont de la même famille, tous deux disciples de Bergson. (…)
C’est bien d’une langue nouvelle qu’il s’agit. Une langue qui pourrait s’apparenter à celle de Jean Tardieu, de Roland Dubillard ou de Nathalie Sarraute en raison de l’amour passionné que tous les quatre portent aux mots, si chacun ne les utilisait à des fins diamétralement opposées. (…) Enjary, lui, les choisit avec une précision méticuleuse : ses personnages hésitent, tâtonnent, se corrigent avec l’obsession maniaque de dire vrai pour penser juste. (…)
Enfin, de chaque pièce nous sommes co-créateurs. On imagine ce que ne nous montre pas Arlette Bonnard : les labyrinthes, les corridors, les escaliers, les cours, les caves, les jardins clos, suspendus, les ruelles, les grottes… tous ces lieux dans lesquels errent les personnages d’Alain Enjary en quête d’une échappée vers un autre lieu sans nom — puisqu’on ne pourra le nommer que lorsqu’on y sera et qu’on ne peut qu’y tendre sans jamais l’atteindre. Et l’on pressent aussi, vaguement, ce que pourrait être ce lieu, différent pour chacun. Car c’est à chacun de nous que revient le soin de déchiffrer et de poursuivre ces pièces en forme d’énigmes. (…) L’inachevé, comme une trouée qui ouvre sur tous les possibles. Claude-Marie Trémois, ESPRIT.

Magnifique ! Au théâtre Paris-Villette, Alain Enjary et Arlette Bonnard proposent « Le Recueil des petites heures ». Composé de cinq pièces que l’on peut voir séparément ce spectacle est de belle qualité. « Sans titre » est passionnant et tente de réfléchir sur la liberté humaine. Un homme découvre un livre où tout ce qu’il dit et tout ce qu’il va dire est écrit. L’affaire est poussée théâtralement jusqu’au bout et le vertige nous prend (…). Manque un relais religieux et psychologique qui nous rendrait pleinement heureux.
Avec « Entre trois et quatre », on assiste à la confrontation d’un couple et d’une jeune étrangère qui, sans le vouloir (mais est-ce si simple ?), brise un amour qui allait renaître. C’est magnifique. Un petit chef d’œuvre d’intelligence, d’esprit, de connaissance psychologique et même d’humour. Les trois comédiens Danièle Marty, Alain Enjary et surtout Arlette Bonnard sont extraordinaires. Il faut y courir. « Bruine » ne m’a pas convaincu et je n’ai pas vu les deux autres. Jean-Luc Jeener, FIGAROSCOPE.

Écrites par le comédien-metteur en scène Alain Enjary, les cinq pièces du Recueil recèlent chacune un mystère et un mythe. Entre absurde et science-fiction, elles tissent un univers à la fois familier et bizarre, de rire et d’effroi. Bruine en particulier, courte farce sur le miracle de l’existence et du langage, vaut le déplacement. Émouvante et inquiète, elle nous embarque dans un théâtre contemporain fait d’ombres et d’énigmes. À part et à découvrir. Alexis Campion, LE JOURNAL DU DIMANCHE.

Le Recueil des petites heures. Ce titre est une métaphore, déclinée en cinq pièces brèves, où l’on abandonne le temps commun pour retrouver ces instants fugitifs vécus comme autant de passerelles mariant le réel au féerique, l’intime au collectif. Un long mur percé de portes et de fenêtres (décor naturel de Bruine, pièce abstraite où la chorégraphie des corps et la distribution du texte s’articulent autour d’un mur, lieu frontière idéal) fait tour à tour office d’arrière-boutique (Le Carillon), de cellules séparées (Les Fenêtres), de salon (Entre trois et quatre), et, tout simplement, de scène (Sans titre). Bel exercice pour les acteurs, qui passent allègrement de l’onirisme pur à la comédie des sentiments, de la farce au genre policier. La longue complicité d’Arlette Bonnard et d’Alain Enjary — elle à la mise en scène, lui à l’écriture — produit une belle et rare cohésion d’ensemble. Fabienne Arvers, L’EXPRESS.

 Le Recueil des petites heures d’Alain Enjary. Elles sont au nombre de cinq. Cinq pièces énigmatiques d’un peu moins de soixante minutes chacune, où le quotidien se teinte de polar et de fantastique pour venir tutoyer le métaphysique. Cinq pièces philosophiques dans une atmosphère en noir, blanc et gris. De cet univers kafkaïen se dégage une poésie étrange qui, sobrement mise en scène par Arlette Bonnard, exprime avec une dérangeante acuité l’absurde et les espoirs de notre condition humaine. Grégoire Leménager, LE NOUVEL OBSERVATEUR.

5 pièces brèves, à voir en ordre dispersé ou en intégrale, formant un réseau spéculatif sur la langue, la parole, l’invention du monde et celle du sacré, au sortir des cavernes premières, pour aller jusqu’aux énigmes de la communication, jusqu’à l’Enigme Communicante. Enjary connaît son Borgès par cœur et le théâtre de l’absurde avec ses agencements de dialogues au sens cassé, caché, échos d’une lointaine demeure aux clés dispersées. Archange ou Archidiable, une intelligence veille. Piotr Gourmandisch, ROUGE.

Entre trois et quatre, chez les habitants du XIXème arrondissement. (…) La métamorphose s’opère doucement avec le texte riche et profond d’Alain Enjary. (…) Cette proximité avec les comédiens procure un sentiment unique : celui d’avoir rencontré une œuvre, son auteur et ses interprètes. Et personne n’a besoin d’être un grand intellectuel pour profiter de ce théâtre-là. Il est charnel, présent. Maëlle Flot, LE PARISIEN.


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